DAMSO – IPSÉITÉ: ÉNERGIE RENOUVELÉE

Moins d’un an après la sortie de son premier projet certifié Disque d’Or, Damso revient avec un album plus personnel et introspectif, tout en explorant davantage certaines orientations musicales dévoilées jadis.

En juillet dernier, Batterie Faible a rapidement confirmé la force et le talent du nouveau protégé de Booba. Qualité d’écriture, variété musicale et aisance technique. Il lui a fallu peu de temps pour remporter son premier disque d’or, trophée symbolique que certains MCs anciennement installés dans le game peinent parfois à décrocher.

Depuis, Damso s’est fait assez discret, sorti du featuring remarqué sur l’excellent Vitrine de Vald et des deux ou trois courts morceaux de teasing. Il faut dire que la vie du rappeur a pas mal changé dans un espace temps réduit, entre succès artistique et paternité.

Des évolutions au centre de nombreux textes de cet album, à commencer par Nwaar Is The New Black. Une intro courte et efficace, signée Ikaz Boi, un proche de Myth Syzer (qui avait lui-même signé le morceau d’ouverture sur Batterie Faible). « Nwaar », la devise de Damso, plus globalement utilisée dans le 92i, une marque egotrip, une signature lyricale propre à l’écurie du Duc. Signature prolongée avec #QuedusaalVie, l’autre emprunte stylistique de Dems. Le MC y déploie un nouveau flow toute en légèreté sur l’instru’ planante de Lens Dupuy, beatmaker inconnu au bataillon. C’est aussi pour cela que l’on écoute du Damso. On tient au passage l’un des meilleurs morceaus du projet!

Dans Batterie Faible, le rappeur faisait déjà l’éventail d’une large aisance musicale, entre morceau dark, énervé et bourré de punchlines, tout en passant par des phases plus mélodieuses. Cette dernière tendance semble avoir été au centre de la direction artistique. Ipséité est clairement un album plus « sucré » que son prédécesseur, dans le sens où Damso choisi majoritairement des mélodies plus douces pour explorer des thèmes personnels et introspectifs. Le percutant Gova et le plus banal Noob Saibot restent les deux autres morceaux du projet se rapprochant des premiers singles ayant popularisé le rappeur bruxellois.

Si la globalité de la tracklist est augmentée par une réalisation soignée sur le plan musical, nous pouvons toutefois noter une certaine redondance (notamment avec certains flows, comme sur Kietu qui fait énormément penser aux placements sur Amnésie). Damso s’ouvre lui aussi à des sonorités afro trap, avec notamment Signaler ou Peur d’être père. C’est à la mode certes, mais il faut avouer que sa voix colle parfaitement, ce qui lui évite d’abuser de l’autotune.

Damso c’est aussi du storytelling et nous sommes servis sur le titre clôturant l’album. On y suit un bail des plus saal, pour ne pas dire malsain. Ce morceau date initialement de 2013, ce qui explique que l’on peut avoir du mal à reconnaître la voix du MC à la première écoute. Abandonné pour des soucis de mastering, Une âme pour deux permet de conclure ce nouveau projet avec une outro énigmatique (faisant d’ailleurs écho au morceau exclu Mort sorti juste avant). On entend Dems mourir sur son lit d’hôpital pour peut-être se réincarner via une nouvelle mixtape imminente. Les théories y vont déjà bon train sur le Web, entre la numération des morceaux dans l’alphabet grec et le leak disponible une semaine avant la sortie officielle. Ne nous emballons pas sur les théories, sachant qu’elles sont souvent de purs fantasmes des fans (on l’a vécu récemment avec le dernier Kendrick Lamar).

En attendant, Ipséité est un projet solide, bien réalisé et confirmant la singularité musicale du rappeur. On s’attendait certes à plus de morceaux kickés, surtout que le MC nous régale à tous les coups sur ce type de prestation. Mais Damso n’en est qu’à ses débuts et il offre déjà une large palette créative, ce qui lui permet de jongler en toute aisance entre plusieurs types de productions. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises avec ce rappeur qui est désormais le parfait étendard du domaine 92i.