SPIDER-MAN HOMECOMING – TISSER SON DESTIN [CRITIQUE]

Spider-Man est de retour, et comment ! Avec Homecoming, l’homme araignée est face à son destin d’Avengers et sa nature teeenage: un film de super-héros qui étonne pour son indépendance.

En ajoutant Spider-Man dans son univers, Marvel avait du pain sur la planche. Suite à la trilogie on ne peut plus cool de Sam Raimi ainsi qu’à l’ébauche aussi grandiloquente qu’inachevée de Sony, l’apparition de l’homme araignée dans le tonique Civil War sonnait comme un retour aux sources avec, tout de même, un brin de nouveauté: une jeunesse totalement réincarnée par Tom Holland ainsi qu’un costume aux contours aussi précis qu’une toile d’araignée. Avec Homecoming, l’heure est venue de sonner le (vrai) grand retour d’un des héros les plus reconnus de l’Amérique.

Mais voilà, ce Spider-Man peine à s’imposer comme un héros reconnu de tous et, surtout, aux yeux de Tony Stark, le big boss des Avengers qui, pour l’occasion, incarne une figure paternelle conforme à son caractère qu’on ne présente plus. En parallèle de ce nouveau défi, Peter Parker semble à peine sorti de sa puberté, obnubilé par cette belle gosse qui lui file entre les doigts et rattrapé par la réalité du lycée en compagnie d’un pote geek un peu trop envahissant. Comment faire le tri, en somme ? La réponse, Jon Watts la possède et la formule avec un élan à mi-chemin entre le teenage movie et le film de super-héros : un compromis intéressant quand on sait combien l’écurie Marvel se perdait dans ses récits formatés et son humour bon public.

C’est simple : Homecoming est certainement l’une des œuvres les plus originales du Marvel Cinematic Universe. Non, il n’est pas question de se la péter à coups de griffes ou de prouver qu’une moustache suffit pour être un pur tyran. Ici, la considération pour l’homme araignée et Peter Parker est à sa hauteur, de quoi s’identifier facilement à lui: le super-héros prolo, trop jeune pour être vrai et en plein apprentissage d’une vie qui ne lui ressemble pas, toujours en train de mesurer ce qui est utile et ce qui est important. Un véritable « teenage dream » qui prend forme à coups de découvertes faites de coups bas.

Chaque instant clé du film repose sur ce dilemme ; cette carrure d’Avengers qu’il compte acquérir n’est-elle pas trop encombrante ? La véritable introspection offerte au personnage rappelle les meilleurs souvenirs de l’univers Marvel, y compris lorsque Stark devait fabriquer sa propre armure pour devenir Iron Man, c’était en 2008. Un mythe se construit par le bas pour arriver à un zénith, certes couru d’avance, mais irrésistible.

Face à lui, Peter Parker fait face au Vautour, un méchant qui, lui aussi, n’en est pas vraiment un et incarné par un Michael Keaton dont les traits sont parfaitement exploités par la caméra de Jon Watts. Là aussi, Marvel semble avoir pris conscience du manque considérable de souffle qu’éprouvait ses antagonismes – faut dire que l’affrontement avec Thanos se fait de plus en plus attendre. Même combat pour l’esthétique générale: les couleurs du film font plaisir à voir et cette atmosphère à la Breakfast Club charme à merveille. Le film repose également sur un montage d’une rare efficacité : ce film est bourré d’actions et présente des situations cohérentes vis-à-vis du storytelling.

Outre les notes assez plates de la bande-originale et des personnages secondaires plutôt inutiles, Homecoming agit comme une véritable aventure qui ne nécessite aucune bravoure esthétique basée sur la surenchère. La meilleure preuve étant certes la présence (finalement) moindre de Tony Stark, mais aussi cette construction inégale – un pas en avant, deux pas en arrière – et frustrante de l’homme araignée ; comme un regret. Les reflets, comme celui du Vautour ou des junkies qui entourent le personnage, se confondent et détonnent par rapport aux illustres Captain America ou Iron Man, pour ne citer qu’eux. C’est une relation de confiance qui s’installe progressivement entre le spectateur et le personnage, comme s’il s’agissait de découvrir une nouvelle fois le personnage dans un monde que lui-même est en train de découvrir. Le procédé d’introspection est pleinement intériorisé, ne reste plus qu’à le vivre.

Avez-vous déjà vu un film Marvel sans Avengers à l’intérieur ? Homecoming est votre réponse à cette question. Fun, sérieux et appliqué, ce nouvel essai cinématographique consacré à l’homme araignée est une réussite sur de nombreux points et confirme que, oui, Marvel est capable de produire des œuvres à la marge – Ant-Man reste une fausse exception. Pas forcément piloté pour faire plaisir aux fans et à l’univers, Spider-Man demeure indépendant, comme il l’a toujours été : ce sera un vrai plaisir de le suivre au cours de ses prochaines aventures.