WESTWORLD (S02E04) – L’ÉTERNEL RETOUR

Comme attendu, le quatrième épisode de cette nouvelle saison de Westworld traite des origines du parc et des mémoires de William et Bernard, en tête d’affiche ici. Notre récap’ 100% spoiler!

Cet article contient des révélations sur le contenu général de la saga  « Westworld ».

Grâce au dernier épisode diffusé la semaine dernière, la saison 2 de Westworld donnait des indices sur la composition des épisodes : d’un côté traiter la révolte menée principalement par Dolores et Maeve, et de l’autre regarder dans le rétro pour s’inspirer des personnages de William et Bernard. Une façon pour Westworld de gagner en homogénéité tout en alternant différents mystères capables évidemment de perdre ses plus grand.e.s fans – il est vrai que cette saison 2 multiplie les énigmes, à en témoigner le nouveau parc à tendance indienne (le Raj) présenté dans l’épisode précédent. Et qui d’autre que l’Homme en Noir et Bernard pour percer les mystères de cet univers et donner de l’ordre dans la mémoire de ses personnages : quand on voit la jeunesse du premier (William) et les souvenirs totalement fragmentés du second, il est vrai que les scénaristes s’en donnent à coeur joie pour faire en sorte que les mystères soient, au mieux, reconstituer. S’il faut encore attendre pour que tout se dévoile explicitement, prenons notre mal en patiente et profitons, tout de même, de ce véritable festival atemporel auquel la série nous avait déjà habitué lors de sa première version.

Répéter et revenir

S’il y a bien deux mouvements à retenir dans cet épisode 4, ce sont la répétition et le retour. Répéter d’abord les expériences, comme celle que William fait subir au double robotique du père de son beau-frère et ancien propriétaire de Westworld : James Delos, interprété par Peter Mullan. Suite à la mort de ce dernier, William aurait « récupérer » les tissus de son corps et relever ses caractères pour créer un double robotique dont l’apparence est complètement similaire (de quoi semer le trouble chez le spectateur avant que la révélation ne se fasse). Une expérimentation supervisée par plusieurs employés de DELOS et William lui-même qui, face aux différents problèmes cognitifs de cette réincarnation contrastée (tremblements, bégaiement), est contraint d’y mettre un terme en tuant brutalement James. Dans cette expérimentation, et les symptômes de celles-ci, une perspective assez nietzschéenne constatable non seulement dans le nihilisme que cela provoque (cela ne mène à rien), mais aussi dans le simple processus de redonner vie à un humain par la robotique. Une démarche digne de la contre-utopie qui fait résonner toutes les possibilités, aussi déstabilisantes et sombres soient-elles, de l’intelligence artificielle.

Et revenir, donc. Revenir peut-être à une forme plus apaisée de la conscience humaine, à une stature digne du surhomme ou au plus grand péché de l’être humain – celui de conquérir l’immortalité. William revient vers James, mais à quoi bon ? Mais le retour, celui de la réincarnation, que l’on désire éternelle et toujours dans l’air du temps, se dévoile aussi sous les formes du passé, à travers les souvenirs de Bernard. Il est repêché par Clémentine, laquelle le laisse seul au milieu de nul part. Mais il retrouve (enfin !) Elsie, son assistante portée disparue dans le parc au milieu de la première version. Consciente que Bernard fut son agresseur, elle se méfie de lui mais prend conscience qu’il n’est finalement qu’un robot et que son organisme faiblit plus que jamais. Alors les deux personnages atterrissent dans un quartier général du parc, du même type que celui du premier épisode lorsque Bernard est accompagné de Charlotte Hale. Sauf qu’ici, une tuerie a eu lieu. Bernard se souvient : c’est lui qui a provoqué cette tuerie, ordonnant aux hôtes de massacrer des employés de DELOS… Autre renversement de situation, au temps présent cette fois-ci : Bernard et Elsie croisent la route de James Delos version robot, complètement défiguré, répétant toujours ses phrases, avant qu’il ne soit éliminé par la seconde. Une excursion pleine de conséquences sur le rôle de Bernard dans le dérèglement progressif du parc et sur le sens de la présence de James Delos à ce moment du récit : il se pourrait que copier robotiquement des humains morts soit la priorité de DELOS dans sa volonté d’immortalité. Ou quand l’éternel devient plus dangereux qu’un péché : c’est devenu un désir immuable.

Rien qu’un jeu

S’il faut bien revenir aux fondements des histoires dans cet épisode, celle de l’Homme en Noir, quant à elle, poursuit sa route en compagnie de Lawrence. Les deux hommes atteignent le village de Las Mulas et croisent le Major Craddock, lequel a été utilisé par Dolores lors de la fusillade de l’épisode précédent, et finissent par tomber entre ses mains. Ce croisement entre les personnages nous confirme une chose : la timeline de l’Homme en Noir a rejoint celle de Dolores, après la fusillade donc, puisque Craddock évoque avoir croisé Wyatt, le nom criminel que porte Dolores dans le nouveau scénario de Ford.  Une occasion pour Lawrence de revoir sa femme et sa fille, alors que l’Homme en Noir semble de plus en plus docile face à la révolte androïde, lui qui fut si indestructible lors de la première version. Parvenant tout de même à s’en sortir, il croise la route de Ford cette fois-ci sous les traits de la fille de Lawrence. L’aventure de William, donc, donne l’impression d’un jeu vidéo : enchaîner les niveaux, quelle que soit la difficulté, et rencontrer le maître du jeu à chaque point de passage pour détecter des indices sur le but de son escapade.

Quand les hôtes cherchent leur liberté, les semi-hommes tels que William (passant sa vie dans le parc), James et Bernard (incarnation du double robotique) tentent tant bien que mal à survivre à cet enfer et décrocher l’éternité en touchant du doigt une forme d’immortalité. On voit que Westworld, finalement, en variant ses épisodes, s’intéresse autant au revers de la médaille (l’enfer et la survie) qu’à sa fondation (la révolte et la quête de liberté qui s’ensuit). La survie des uns fait le jeu des autres (et on pense fortement à DELOS et ses objectifs encore sombres jusqu’ici). Westworld nous mène dans une voie propice à l’éclatement de son univers, comme en témoigne la variation de ton de ses épisodes et les tiroirs qui se multiplient dans la quête d’identité des personnages. Et lorsqu’on apprend que l’Homme en Noir a une fille, et que celle-ci n’est en fait que la femme qui réussit à s’échapper de la révolte du Raj dans l’épisode précédent, on se dit qu’on n’est toujours pas au bout de nos surprises et que le jeu auquel les personnages sont voués nous concernent également avec les tonnes de révélations qui s’apprêtent à se dévoiler (comme le Shogun World dans le prochain épisode).

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Westworld semble avancer à toute vitesse vers des conclusions terribles pour ses personnages par le biais d’une économie narrative qui maintient le spectateur dans une forme d’expectative aussi embarrassante que passionnante. Embarrassante car on ne sait pas trop où la série veut en venir, mais passionnante parce que c’est aussi ce qui forge cette saga futuriste : tirer les ficelles, et les lâcher dès que possible pour surprendre son audience. Un pari fidèle à la première version, mais osé quand on sait toutes les attentes et passions que la série suscite.

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