Matthias & Maxime – Xavier Anyways [CRITIQUE]

Avec Matthias et Maxime, Xavier Dolan revient à ses premières amours de cinéma, au Québec. On le croirait presque apaisé dans un film qui fait appel à ses fondamentaux proches de l’ère pré-Mommy qui l’a vu éclore. 

Matthias et Maxime est sincèrement intimiste, volontairement loin du grandiloquent. On y découvre même un Xavier Dolan gouailleur, qui parsème son film de petites répliques truculentes. Denys Arcand en prend notamment pour son grade, dans une réflexion qui relève presque du méta. En un sens, on observe un Dolan plus réflexif sur lui-même qu’à l’accoutumée. C’est ainsi l’occasion pour Dolan de se recentrer sur les passions plus simples qui l’animent. La question de l’identité anime comme à l’accoutumée son film : Matthias et Max sont deux personnages qui perdent leurs repères, sous l’oeil intrigué du groupe formé par leurs amis et familles. Il introduit par ailleurs une nouvelle problématique, celle des rapports entre le québécois et l’anglais. En développant le motif de la confusion dans cette direction, l’anglais devient le langage de celui qui cherche à se différencier, s’affirmer… Peut-être à s’évader. Ce tableau de jeunes hommes en quête d’eux-même est complété par la sempiternelle thématique du rapport filial dans la dimension la plus violente qui soit. 

Les personnages n’existent pas contre le groupe mais avec lui.

Le film marque le retour en force des personnages qui s’invectivent à quelques centimètres de l’objectif d’une caméra portée à l’épaule, comme celui d’Anne Dorval dans le rôle d’une mère : il n’y a pas de coïncidence. C’est enfin le grand retour de Xavier himself en – presque – personnage principal ; ce qu’on n’avait pas vu depuis Tom à la ferme en 2013. Son Maxime ne prend pour autant jamais le pas sur Matthias, incarné par Gabriel D’Almeida Freitas. Humoriste à l’origine, ce dernier se révèle être un excellent acteur et l’un des deux piliers du film. Les scènes de groupe sont denses, vivantes et brillamment mises en scène. Le réalisateur semble s’intéresser réellement au groupe d’amis qu’il a mis en place, sans avoir besoin de le segmenter rigoureusement (comme il avait pu le faire dans Juste la fin du monde, par exemple). Pour la première fois, les personnages n’existent pas contre le groupe mais avec lui. Il laisse à chacun de ses personnages un moment pour exister, à la fois dans le groupe et dans les dynamiques du film. 

Pièces musicales diégétiques et cadres uniquement figuratifs sont bien là puisque chers à Dolan mais épars, presque absents du film ; volonté affirmée de se concentrer sur l’intrigue et ses enjeux. Il s’offre toutefois une scène aux accents impressionnistes : Maxime nageant éperdument au milieu d’un lac, tous curseurs de volume au maximum. Pendant quelques instants, le spectateur sombre avec lui alors que le réalisateur l’avait auparavant maintenu dans sa position d’observateur, comme lors d’un surprenant travelling horizontal dont révéler la direction serait déjà trop en dire. 

Matthias et Maxime est donc un film agréable ; un plaisir simple réalisé par un Dolan regonflé. En un sens, tout cela tendrait à prouver que John F. Donovan est bien une parenthèse américaine dans sa filmographie . Contrechamp inversé, Matthias et Maxime permettra – on l’espère – d’introduire les spectateurs qui l’auront apprécié aux quatre premiers films du réalisateur.